Conference de Henry Mintzberg

Publié le par Minglan

« Learn from everybody, copy nobody »


Henry Mintzberg a Tsinghua University
Management, vision du monde et conseils aux Chinois


 

 

 

J'ai eu la chance, mercredi 26 avril au soir, d'assister a une conference de Henry Mintzberg, un des grands chercheurs en management strategique, dans notre universite.

 

Je me dis que j'ai souvent de la chance d'etre en Chine : alors que je n'aurais jamais, a cause de mon parcours atypique, faire mon doctorat dans les grands ecoles et universites francaises qui m'auraient permis de rencontrer de grands noms de mon domaine, le gouvernement chinois m'a offert cette chance d'etudier dans la plus prestigieuse universite du pays, qui accueille regulierement de grands chercheurs venus du monde entier, et d'autres personnalites. C'est ainsi qu'il y a quelques mois, j'avais pu assister a une conference d'Al Gore, j'aurais au moins vu a quoi il ressemblait en realite ! Ou que j'avais pu echanger des idees de maniere toute simple avec le numero 2 d'Axa venu a l'universite. Mais mercredi, j'ai eu la chance encore plus grande de pouvoir assister a une conference d'un des grands auteurs en science de gestion.



Henry Mintzberg est un de mes auteurs fetiches en management. Sa conference de mercredi portait sur le management et des questions de reflexion plus generales adressees aux futures elites chinoises. Elle resumait les idees directrices de cet interessant chercheur. Je vous en propose donc les grandes lignes.

 

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Henry Mintzberg
"Developing Managers, Teaching Business :
Next generation of Management"

 



Le management est une pratique que l'on peut representer par un triangle compose de trois angles :

- en haut, ART : imagination / creative insights
- a gauche, SCIENCE : analysis / proven facts
- en droite, CRAFT : experience  / practical learning




En realite, le management situe entre ces trois angles. Mais il penche souvent d'un cote ou de l'autre.

Management selon les pays

Aux Etats-Unis, on assiste de plus en plus a un mouvement du cote « science » (NDLR : on le voit bien egalement dans la vision politique americaine, ou tous les problemes internationaux semblent pouvoir etre resolus grace aux technologies militaires sophistiquees).

Au Japon, l'exercice de la gestion se fonde plus sur l?experience.

La Chine est plutot du cote « artistique », mais se dirige de plus en plus vers les autres angles.

 

Types de management

Les trois angles du triangle correspondent a trois types de management :

- Science : plus « analytical ». Mais l'extreme dangereux sont les « calculating managers ».
- Craft : « engaging managing » : On est engage dans sa companie et l'on rend aussi les autres motives. Mais l'extreme dangereux sont les « tediars » (NDLR : si quelqu'un peut m'expliquer...)
- Art : plus « insighted ». Mais l'extreme dangereux sont les « narcissistic managers ».

 

Un des modeles populaires est celui du manager « heroique », situe entre le cote « visionnaire » et le cote « analytique ». Mais d'apres Mintzberg, ce modele est appele a echouer.. et de donner l'exemple de Vivendi et de Jean-Marie Messier!

 

Decision making

La prise de decision peut aussi est representee par ce triangle :

- Science : pas a pas : « Think first, then act »
- Craft: "Act first"
- Art: "See first" (vue globale et non pas en sequence comme dans la pensee rationnelle scientifique).

 

Mintzberg s?attarde beaucoup sur le cote « artistique », qui est selon lui caracteristique des grands genies scientifiques.

Mais il ne pense pas que les gens creatifs soient peu nombreux. Selon lui, c'est meme plutot le contraire : nous sommes tous creatifs, mais nous nous laissons bloquer par la societe et par nos peurs. Les gens que nous appelons « creatifs » sont seulement ceux qui parmi nous ont le courage de montrer leur creativite.


« Creativ people have the courage to see the reality as it is ».

 

 

La strategie

 

NDLR: Il suffit de lire les ouvrages de Mintzberg pour savoir qu'il s'oppose a la vision scientifique de la strategie, notamment la planification strategique (ou du moins qu'il en reduit la portee et l'utilisation).

 

Selon lui, la strategie est un processus ou tout converge vers l'emergence de la strategie (cote « craft ») qui mene a une vision (cote « art »). C'est ensuite seulement que l'on peut envisager une programmation (cote « science »).

Si trop de cote analytique est reducteur, Mintzberg s'oppose aussi au tout « vision ». Une vision trop large n'est plus une vision. Le but de la strategie est donc de definir les limites dans lesquelles peuvent se derouler les strategies (emergentes).

 

D'apres Mintzberg, la mode des « shareholder values » aux USA, que l'on peut resumer par « push the stock price as quick as you can then run for cover », est un « anti-social concept which destroys companies ».


Enseignement des sciences de gestion


Concernant l'enseignement des sciences de gestion, le MBA est un concept dangereux (s'il n'est pas associe a une experience professionnelle), car il repose sur le cote analytique et l'utilisation de modeles, d'outils.

« The assumption that you can be a manager by MBA is a mistake ».

"We can't create a leader in a classroom".

Le mieux est donc d'etre d'abord manager, puis de revenir ensuite dans la classe.



Society : Electronic Pamphlet

 

USA : doivent depasser Adam Smith
Vieille Europe : doit depasser Karl Marx
Et la Chine? doit depasser les deux !

 

Le probleme est qu'on reflechit toujours en binaire :

Adam Smith contre Karl Marx
Capitalisme contre communisme
Droite contre gauche

 

Mais selon Mintzberg, il ne faut pas dessiner ces relations par une ligne droite opposant les deux, mais plutot par un demi-cercle : au bout gauche se trouve le pouvoir politique, pouvoir collectifet public, et a droite le pouvoir economique, pouvoir individuel et prive. Mais sur la courbure du cercle, l'on trouve quelque chose souvent oublie : le social, ou « community power ».


En effet, le secteur social se situe entre le prive (economie) et le public (politique): ONG, universites..

Chaque secteur (prive, public et social) est efficace pour certaines choses et pas d'autres.

 

La Chine d'avant etait entierement basee sur le cote public. Aujourd'hui, elle est entierement tournee sur le prive. Et la-dedans, la question est : ou se trouve le social ?


Mintzberg deplore que le secteur social ne soit pas du tout soutenu et voire completement ignore en Chine. Selon lui, c'est parce qu'on a garde le schema binaire opposant seulement le public a gauche et le prive a droite.

 


Par ailleurs, Mintzberg met en garde contre l?admiration abusive des Etats-Unis.

La plupart des innovations en management apparaissent en Angleterre. Mais personne ne s'en occupe, parce qu?on ne regarde que le pays qui a le pouvoir. Pourtant, le succes americain est base sur son passe. « What has made sucessful, it is not necesserary what they are doing now ».

Il faut egalement se mefier de la globalisation, qui ne permet pas une bonne redistribution des richesses.

 

Il faut apprendre a regarder d'autres pays : le Bresil, l'Afrique du Sud, la Suede, le Canada...

(parle aussi du Bhoutan en reponse a une question : selon lui, le Bhoutan innove beaucoup : protection des ressources naturelles qui sont pourtant une des seules richesses du pays, pays qui a developpe le concept de « Growth of National Hapiness »).

 

Et la Chine ?

Can you (Chinese) do things your way or will you do like the others ?

 

Mintzberg avait un dernier conseil a donner aux Chinois a ce sujet :


« Learn from everybody, copy nobody ».




 

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