Paysages et chauffage en Chine du Nord

Publié le par Minglan

暖气, nuanqi, 炕, kang et 吃苦, chiku
Le chauffage dessine les paysages urbains

de la Chine du Nord




Un temps a neige se prepare fin decembre




Apres un temps qui annoncait l'arrivee de la neige des le 21 decembre, nous eumes l'agreable surprise de la voir tomber le samedi 31 au matin, a flocons drus. Elle ne tint pas longtemps au sol, mais le froid de l'hiver, lui, decida de rester nous tenir compagnie.

Heureusement qu'en Chine du Nord il y a le 暖气, nuanqi, CHAUFFAGE. Notre precieux compagnon de l'hiver, que tout le monde attend avec impatience a partir de novembre, ne vient pas entre nos quatre murs par magie.

En Chine du nord, la plupart des foyers urbains ont le chauffage central, fourni par la municipalite. Avant, le chauffage etait fourni gratuitement, mais naturellement cela a change.
A la campagne, dans le Hebei ou dans le Heilongjiang, la province la plus au nord de la Chine qui jouxte la Russie, les maisons que j'ai visitees avaient le chauffage central. Cependant c'etait des maisons de paysans sans doute plus aises que d'autres, car ils etaient a proximite de
lieux touristiques. Ces maisons avaient cependant encore leur kang. Le 炕, kang, c'est un lit chauffant: en realite, c'est une sorte de grande estrade en briques (et carrelage par-dessus), fermee, avec juste un trou en bas pour pouvoir y mettre du bois que l'on fait bruler. On fait donc chauffer le kang par dessous, et ainsi on peut dormir au chaud... Au chaud, c'est le cas de le dire. Mes amis m'ont dit que les kangs etaient si brulants qu'il etait difficile de s'y coucher dessus!
Le kang etait le moyen de chauffage tradionnel en Chine du Nord. Il est toujours utilise aujourd'hui dans certains endroits. Pour ceux qui ont la chance d'avoir le chauffage central, le kang continue de servir, comme avant, de lit sureleve et parfois de lieu pour le repas: on y place une table basse et l'on mange a plusieurs autour, assis en tailleur.


Dans les appartements modernes des villes, plus de kang. A Pekin, l'on est bien chauffe, trop bien meme. Souvent les chaudieres fonctionnent a plein regime et la chaleur est etouffante. Comme l'on ne peut pas regler le chauffage apparemment, l'on assiste a une depense d'energie inimaginable: l'autre jour, en entrant dans un bureau de l'universite, j'ai decouvert que les employes, pour avoir moins chaud avaient mis... la climatisation a fond!! Rien de mieux pour gaspiller de l'energie et attraper un bon rhume!
Le chauffage a Pekin, comme dans les autres villes du Nord, est fourni par des centrales reparties par groupes d'immeubles, et fonctionnant pour la plupart au charbon.
Ainsi, il est inutile de chercher longtemps dans quel paysage desole a ete prise la photo ci-dessous...





Il s'agit tout simplement de la centrale de mon universite vue depuis la route exterieure!!
La premiere fois que je suis passee devant, j'ai cru qu'il s'agissait d'une usine, tant est grande la cheminee, haut le tas de charbon et immense le terrain vague autour! C'etait encore plus impressionnant parce qu'il faisait nuit. L'arbre sur la photo sert d'echelle pour vous donner une idee de la hauteur de la cheminee.

A ce moment-la, le chauffage n'etait pas encore en marche. Mais a present, un grand panache de fumee s'eleve nuit et jour de la cheminee. La photo ci-dessous a ete prise le 31 decembre a l'entree de la centrale de l'universite, non loin de mon dortoir. Les enormes tuyaux que vous apercevez vous rappelleront le paysage industriel de Dashanzi, le quartier rehabilite par des artistes dont je vous avais parle dans mon precedent article. Zigzaguant autour de la centrale, ils servent a acheminer le chauffage dans l'universite.






Quand je regarde le paysage depuis ma fenetre au 9eme etage, je vois les panaches de fumee qui s'envolent vers le ciel depuis les hautes cheminees dispersees dans le quartier... C'est un paysage tres particulier, gris, industriel, qui rappelle le passe recent
de la Chine a la gloire de l'industrialisation de masse.



Ainsi, ou que vous alliez dans Pekin, vous tomberez sur ces cheminees gigantesques, inattendues, entre deux groupes d'immeubles. L'on a beau savoir leur presence, leur imposant profil qui se decoupe soudain dans le ciel au detour du virage d'une route ne manque pas d'impressionner.




Ces cheminees deviennent le symbole d'une Chine entre le passe et l'avenir qu'elle se prepare. Ainsi sur la photo ci-dessous, je sors
d'un grand building de verre hyper-moderne avec son design high-tech pour apercevoir juste en face de la rue un ensemble architectural des annees 70-80 qui rappelle beaucoup de paysages industriels des pays de l'Europe de l'Est.



Le probleme, naturellement, est celui pose par la pollution. Les chiffres sont inquietants, mais sont beaucoup moins parlants que la vision de la realite: ces immenses tas de charbon que l'on apercoit, destines a l'alimentation des centrales, comme celui destine a la centrale de l'universite, en noir au fond de la cour, et qui doit bien faire 3-5 m de haut...




Malheureusement, cette pollution fait notre confort de tous les jours. Le chauffage n'est disponible qu'au nord du fleuve bleu (ou du fleuve jaune? j'ai un doute soudain, a verifier...). Or certaines villes du sud de la Chine sont quand meme fraiches en hiver, parce qu'il y fait humide. Un ami qui travaillait a Ningbo m'avait dit il y a deux ans qu'il n'avait pas de chauffage central dans son appartement, et qu'il y faisait 5 degres!! Il pouvait bien utiliser la climatisation en mode inverse, mais cela consommait tant d'electricite que les factures etaient astronomiques. Il s'etait donc resolu a passer l'hiver en grelottant...
Tout le monde n'a pas non plus la chance d'avoir le chauffage en Chine du Nord, meme dans la ville, parfois parce qu'il n'est pas installe, parfois par choix economique. Un ami chinois m'avait dit qu'a ses debuts, quand il avait monte son entreprise avec quelques amis, ils n'avaient pas beaucoup d'argent et avaient donc installe leurs bureaux dans un immeuble non termine, sans vitres aux fenetres. Ils avaient passe 6 mois ainsi, donc quasiment tout l'hiver. Vous pouvez aisement imaginer la temperature qui regnait a l'interieur quand a l'exterieur il faisait jusqu'a -10 degres...

Ce genre d'anectdote me fait souvent penser combien les autres amis chinois avec je parle ont raison: ils me disent souvent:
"Nous les Chinois, 我们会吃苦, women hui chiku, nous savons manger la poussiere, endurer les difficultes"...
, chi = manger
, ku = amertume / peine, misere, souffrance

Je pense a cela tous les jours quand, apres avoir ete giflee par le vent glacial pour avoir parcouru la fac ou la ville en velo, je retrouve une chambre douillette et (la plupart du temps) bien chauffee!!

Publié dans La Chine et le chinois

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