La dure vie des ecoliers chinois

Publié le par Minglan

麻燕 - Ma Yan en est a Gao San et ne se decourage pas
La pression quotidienne sur les ecoliers chinois
压力: yali, la pression



Reviser ses lecons a 7h00 du matin
La dure vie quotidienne des collegiens et lyceens chinois
Filmee au jour le jour dans le documentaire sur Ma Yan


Hier soir, la television diffusait deux programmes interessants. Une emission de tele-realite comme on en voit en France, avec un echange de famille, sur Beijing TV1. Et sur CCTV News, un documentaire sur Ma Yan, une ecoliere a present bien connue, dont je vais vous parler.


L'emission de tele-realite differait de ce que l'on voit en France. Il s'agissait pour deux jeunes filles de quinze ans assez "desobeissantes" de changer de famille pendant quelques jours. Mais a la difference de ce qu'on a pu voir en France, les familles choisies n'avaient pas un grand ecart de revenus ou d'education. Alors qu'en France, ce genre d'emission sert a ridiculiser ou a mettre en valeur, l'emission chinoise etait plus interessante, car elle cherchait a analyser et resoudre les problemes d'education des deux familles, faisant appel a un "professeur d'education des familles" qui donnait quelques conseils. Mais surtout, l'on voyait combien l'education etait semblable dans les deux familles, ou la pression pour les etudes etait tres forte. A un moment, l'on voyait une des meres de famille dire a la jeune fille de l'autre famille venue chez elle de faire ses devoirs, et elle placait a cet effet devant la jeune fille une pile de livres qui depassait la hauteur de la lyceenne assise... Ni une ni deux, la lyceenne rusait profitait de ce que la mere qui l'accueillait avait le dos tourne pour appeler un de ses camarades de classe pour qu'il fasse ses devoirs a sa place, pour 20 yuans (2 euros). Ce genre de transaction, tout comme les "substitutions" de personnes pendant les examens, est frequent en Chine!


Le documentaire sur Ma Yan etait encore plus interessant, puisqu'il filmait la vie quotidienne de lyceens en derniere annee de lycee, le 高三, Gao San, (高, Gao pour lycee, 三, San pour la troisieme annee).
麻燕, Ma Yan, c'est une ecoliere pauvre de la province du Ningxia devenue heroine grace a un heureux hasard qui a mis Pierre Haski, le correspondant de Libe (lisez son journal, voir les liens ci-contre), sur son chemin. La publication de son histoire, ecrite a partir du journal intime que tenait Ma Yan, a permis d'attirer l'attention des medias et des donateurs, qui ont permis a Ma Yan et d'autres enfants de pouvoir aller a l'ecole pour continuer leurs etudes.  Depuis ce jour-la, le gouvernement chinois a pas mal mediatise son histoire, et des documentaires ont ete tournes sur elle.

Naturellement, si vous n'avez pas encore lu le journal de Ma Yan, je vous conseille fortement de le faire. Il exprime les souffrances, les espoirs et le courage d'une famille de ces paysans pauvres qui composent la majeure partie de la population chinoise. N'oubliez pas que ce que je vous decris souvent est la vie de Chinois urbains de la classe moyenne, c'est loin d'etre le quotidien de la plupart des Chinois. Si vous lisez le journal de Ma Yan, vous vous apercevrez qu'une des phrases qui revient le plus souvent, c'est: "J'ai faim". Il est toujours utile de mesurer sa propre situation quand on lit des situations comme celles que vit quotidiennement Ma Yan, qui se prive de manger des legumes pendant une semaine pour pouvoir s'acheter un stylo.

A present, Ma Yan n'a plus de soucis financiers, mais il lui reste les soucis des etudes. Malgre son acharnement a reussir, son niveau n'est pas toujours suffisant. Mais faut-il s'etonner quand on voit, comme sur la photo plus haut, la vie que menent les collegiens et lyceens chinois? Des tonnes de livres a apprendre par coeur, des heures de travail personnel a effectuer le soir et le matin (n'oubliez pas que les etudiants chinois sont quasiment tous des internes, ils vivent dans le lycee, y travaillent tres tard le soir, dorment dans des dortoirs minuscules pour quatre personnes ou plus, et se levent aux aurores), et une pression constante pour l'excellence. Meme si Ma Yan se trouve dans un lycee d'une petite ville, la pression est la meme.


En Chine, toute l'education est fondee sur l'excellence. Je vous en avais parle lorsque j'avais resume la conference du centre d'aide psychologique pour les etudiants de Tsinghua.
Le parcours scolaire est entierement fonde sur des concours, les plus importants etant le concours d'entree au lycee, appele "中考, zhong kao", ", kao" pour le concours, et ", zhong" pour milieu (mais en fait , c'est le nom du cursus secondaire, le college etant appele "初中, chuzhong" (", chu" = debut) et le lycee "高中, gaozhong" (", gao" = haut, ici: superieur au sens d'etudes superieures), puis le concours d'entree en universite, appele "高考, Gao Kao".
Ces concours sont fondes sur du par coeur, des reponses pointues a des QCM et un niveau tres avance en mathematiques en general, du moins pour les filieres scientifiques. Cette specificite fait d'ailleurs que les etudiants chinois sont en general excellents dans les filieres scientifiques, notamment en mathematiques, et reussissent par exemple brillamment lorsqu'ils entrent en classes prepa en France. Tout simplement parce que, la pression que les etudiants francais en classes prepa supportent mal, les etudiants chinois y sont habitues depuis si longtemps...
Dans le documentaire sur Ma Yan, la pression etait notamment renforcee par le decompte des jours. Chaque jour, un etudiant ecrivait la date au tableau et marquait en dessous: "tant de jours restant avant le Gao Kao".


Je ne sais pas si Ma Yan a reussi le Gao Kao, je l'espere pour elle apres tous ses efforts.
Mais de toute facon, la reussite du Gao Kao ne rend pas automatiquement la vie des etudiants plus simple. En effet, les etudiants doivent choisir, avant le concours, une liste d'universites (20 si je me rappelle bien) dans lesquelles ils esperent entrer. Les universites sont classees par rang, on peut choisir tant d'universites de tel ou tel rang. Par exemple, l'universite ou je me trouve actuellement est classee dans le premier rang. Une amie chinoise m'avait dit il y a deux ans que pour arriver a choisir une universite (il y en a plus de 1000 en Chine, sans compter les privees!!), les lyceens passaient un concours blanc qui leur donnait une estimation de leurs chances d'entrer dans telle ou telle universite pour ensuite pouvoir choisir les plus adequates(chaque universite etablissant un bareme d'entree en plus du bareme national... le systeme du Gao Kao est tres complique, si vous voulez plus d'informations, vous pouvez lire utilement les documents d'analyse ecrits par le service culturel de l'Ambassade de France en Chine,
www.ambafrance-cn.org).  
Mais ensuite, la note obtenue au Gao Kao determine aussi la possibilite ou non d'entrer dans telle ou telle filiere, et le diplome a preparer (大专, Dazhuan, Bac +3 niveau BTS, ou 本科, Benke, Bac +4 niveau Licence-Maitrise). C'est pourquoi beaucoup d'etudiants chinois n'ont pas de projet d'etudes. Ils suivent une voie deja determinee. Et lorsqu'ils ont eux-memes le choix, en general, ils suivent ce que leurs parents souhaitent qu'ils fassent... d'ou un nombre d'inscription tres eleve dans les filieres economiques, le but de la famille qui "mise" sur les enfants etant de s'assurer un avenir meilleur. La pression est encore plus forte lorsqu'il s'agit d'un enfant unique et lorsque c'est un garcon.

A present, vous comprenez mieux pourquoi dans le questionnnaire psychologique que l'universite nous faisait remplir a nous les etudiants de troisieme cycle pour etablir si nous etions des sujets a risque (de suicide), un des items etait: "les espoirs de mes parents sont trop hauts"...



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